On a longtemps cru qu’aucun traitement n’existait contre la maladie d’Alzheimer. Pourtant, cette affirmation est aujourd’hui à nuancer, voire à remettre en question. En effet, de nouveaux traitements ont récemment vu le jour, offrant ainsi des perspectives prometteuses pour les personnes malades et leurs proches aidants.
Les traitements déjà existants
Si de nouveaux traitements suscitent beaucoup d’espoir, il est important de rappeler que d’autres approches, déjà en place, permettent d’accompagner les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et d’atténuer certains de leurs symptômes.
Les interventions non médicamenteuses
Les interventions non médicamenteuses regroupent diverses approches thérapeutiques visant à améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, tout en ralentissant le déclin des fonctions cognitives. Elles peuvent être mises en place à différents stades de la maladie, aussi bien individuellement qu’en groupe.
Parmi ces approches, on retrouve l’orthophonie, la stimulation cognitive, l’activité physique adaptée (APA), les thérapies basées sur l’art, la musique, la danse… Ces interventions ont démontré des bénéfices concrets sur les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.
Les traitements médicamenteux
Les traitements médicamenteux actuels présentent plusieurs objectifs. D’une part, ils cherchent à stimuler les fonctions cérébrales afin d’agir sur les symptômes déficitaires comme les troubles de la mémoire, du langage, de l’attention, ainsi que sur l’anxiété et la baisse du moral. Si restaurer un fonctionnement neuronal normal demeure complexe, ces traitements contribuent à ralentir la progression de la maladie.
D’autre part, les traitements médicamenteux visent à réduire les symptômes dits productifs tels que l’agitation et les idées délirantes. Lorsqu’il n’est pas possible de réduire les symptômes, ces médicaments cherchent à optimiser la compensation fonctionnelle afin de limiter l’impact de la maladie sur les activités quotidiennes. Dans tous les cas, l’amélioration du bien-être et de la qualité de vie reste une priorité.
Médicaments actuellement disponibles contre la maladie d’Alzheimer
À ce jour, quatre médicaments sont disponibles sur le marché : le donépézil, la rivastigmine, la galantamine et la mémantine. Le donépézil, la galantamine et la rivastigmine agissent sur les neurotransmetteurs en ciblant un déficit bien connu dans la maladie d’Alzheimer : la diminution de l’acétylcholine. Ce neurotransmetteur joue un rôle clé dans l’attention, la concentration et la mémoire. Ces médicaments empêchent la dégradation de l’acétylcholine dans les zones du cerveau concernées, permettant ainsi de ralentir les symptômes associés.
La mémantine, quant à elle, agit sur les récepteurs du glutamate, un autre neurotransmetteur impliqué dans la mémoire et le comportement. Son utilisation permet de réduire certains symptômes comportementaux tels que l’agressivité et l’anxiété et de favoriser certaines capacités cognitives.
Des études ont démontré leur efficacité sur la réflexion, la mémoire, la communication, la réalisation de certaines activités quotidiennes. Par ailleurs, certaines recherches ont confirmé qu’elles n’augmentent pas le risque de décès, et pourraient au contraire contribuer à le réduire.
Malgré ces bénéfices avérés, ces médicaments ne sont plus remboursés depuis 2018. Une décision controversée au regard des preuves scientifiques de leur efficacité. S’ils présentent des effets indésirables, aucun risque majeur ne semble justifier leur non-utilisation. Au contraire, leurs bénéfices dépassent largement les risques, renforçant l’intérêt de leur prescription dans la prise en charge de la maladie d’Alzheimer.

Les nouveaux traitements
Le développement et la mise sur le marché des nouveaux traitements contre la maladie d’Alzheimer suivent un processus long et rigoureusement encadré, s’étendant sur environ 10 à 14 ans. Durant ces dernières décennies, de nombreux médicaments ciblant les plaques amyloïdes ont été élaborés, avec des résultats variables.
Aujourd’hui, deux traitements à base d’anticorps anti-amyloïdes ont déposé une demande d’autorisation de mise sur le marché auprès de l’Agence Européenne du Médicament (EMA). Parmi eux, le lecanemab, commercialisé sous le nom de Leqembi, a reçu un avis favorable du comité scientifique, tandis que le donanemab, connu sous le nom de Kinsula, est en attente d’une réponse officielle.
Ces traitements ont démontré une action directe sur certains mécanismes biologiques impliqués dans la maladie d’Alzheimer :
- En permettant une réduction très significative des dépôts amyloïdes dans le cerveau des personnes malades.
- En entraînant une diminution des marqueurs liés aux lésions neuronales, notamment la protéine Tau, qui, en temps normal, augmente avec la progression de la maladie et accentue le déclin cognitif. Une étude spécifique menée sur le lecanemab a également mis en évidence une réduction d’un autre marqueur d’altération neuronale, la neurogranine, confirmant ainsi l’impact neuroprotecteur de cette molécule.
Bien que ces médicaments ne permettent pas d’arrêter la progression de la maladie, ils contribuent à ralentir l’évolution du déclin cognitif et fonctionnel. Les données issues des essais cliniques indiquent que le lecanemab permettrait une réduction du déclin de 27 % après 18 mois de traitement, un résultat comparable à celui observé avec le donanemab, qui affiche une réduction de 27,8 %. En d’autres termes, ces traitements offriraient un ralentissement des symptômes d’environ six mois sur une période d’évaluation de 18 mois.
Effets indésirables de ces nouveaux traitements Alzheimer
Malgré ces résultats positifs, ces nouveaux traitements présentent toutefois un effet secondaire majeur : le syndrome ARIA (Anomalies Radiologiques liées à l’Amyloïde). Cette complication peut se manifester sous deux formes distinctes :
- Des œdèmes cérébraux, qui peuvent être asymptomatiques ou entraîner des troubles légers, tels que des maux de tête ou une sensation de confusion. Avec le lecanemab, 12 % des patients présentent un œdème sans symptômes et 2,8 % développent des symptômes (y compris légers), ce qui est considéré comme un effet secondaire fréquent. Le donanemab affiche des taux plus élevés, avec 18 % des patients asymptomatiques et 6 % présentant des symptômes.
- Des micro-saignements dans le cerveau, ne causant généralement aucun symptôme. Toutefois, dans certains cas plus rares, ces saignements peuvent entraîner des symptômes sévères, notamment des confusions, des crises d’épilepsie, des troubles de la vision, voire, dans les cas extrêmes, le décès. Sous lecanemab, 17 % des patients présentent des micro-saignements sans symptômes et 0,7 % développent des complications symptomatiques. Avec le donanemab, ces chiffres sont plus élevés, atteignant 31 % de patients asymptomatiques.
L’intensité de ces effets secondaires semble être dose-dépendante : plus la quantité de médicament administrée est importante, plus le risque de développer ce syndrome est élevé. Toutefois, il est à noter que ce type d’effet indésirable apparaît essentiellement en début de traitement. Une fois cette phase initiale passée, si aucun effet secondaire majeur ne s’est manifesté, le risque de développer un syndrome ARIA par la suite devient très faible.
Discussions
Ces nouveaux médicaments sont déjà commercialisés dans certains pays, notamment aux États-Unis et au Japon. Cependant, leur mise en place en France nécessitera une évaluation rigoureuse et personnalisée. Consciente des risques associés, la Fédération des Centres Mémoire en France a déjà mis en place des recommandations pour garantir un usage sécurisé de ces traitements. Ces recommandations incluent notamment la vérification de l’absence de contre-indications, l’identification de facteurs de risque génétiques ou vasculaires et une évaluation individualisée du rapport bénéfice/risque pour chaque patient.
De ce fait, si ces médicaments sont autorisés en France, ils ne seront pas systématiquement prescrits à toutes les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, mais feront l’objet d’une évaluation personnalisée afin de s’assurer que les bénéfices attendus surpassent les risques potentiels.
Toutefois, plusieurs obstacles restent à surmonter avant leur généralisation :
- Une efficacité parfois considérée comme limitée, avec des bénéfices modestes sur les symptômes qui peuvent être difficiles à percevoir pour les patients et leurs proches.
- Des effets secondaires notables, nécessitant une surveillance médicale stricte.
- Un coût encore incertain
- Des contraintes logistiques importantes, ces traitements nécessitant une administration par perfusion en milieu hospitalier toutes les deux semaines, ainsi qu’un suivi par IRM cérébrale pour détecter d’éventuelles complications.
Perspectives et avenir de la recherche
Les récentes avancées dans le traitement de la maladie d’Alzheimer marquent une étape significative et ouvrent de nouvelles perspectives, tant pour les patients que pour leurs proches aidants. D’une part, ces progrès stimulent la recherche en redonnant un nouvel élan aux laboratoires pharmaceutiques, qui intensifient leurs efforts pour développer des solutions toujours plus efficaces. D’autre part, ils constituent une opportunité précieuse pour repenser et améliorer le parcours de soin des personnes malades.
En parallèle, la recherche continue d’explorer diverses pistes pour mieux comprendre et combattre la maladie. Des études s’intéressent notamment à l’impact de l’environnement, au rôle du microbiote intestinal et à la possibilité de réutiliser certains médicaments initialement développés pour d’autres pathologies. Bien que ces travaux en soient encore à différents stades d’évaluation, ils pourraient, à terme, déboucher sur des solutions complémentaires pour améliorer la prise en charge des patients et alléger le quotidien des aidants.
Par ailleurs, l’essor de nouvelles approches thérapeutiques, comme les thérapies géniques et cellulaires, ouvre des perspectives prometteuses. À l’avenir, ces innovations pourraient venir compléter les traitements existants et contribuer à ralentir encore davantage l’évolution de la maladie.
Références
Fondation Alzheimer. (17 mars 2025). Semaine du cerveau. Derniers traitements anti-Alzheimer : pouvons-nous enfin soigner les malades.
Institut Pasteur. Alzheimer (maladie d’).